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Francis Madore : La piqûre de l'agriculture

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Actu - Francis Madore : La piqûre de l'agriculture

Issu d’une famille montréalaise urbaine et ayant beaucoup voyagé, rien ne prédestinait Francis Madore à cultiver la terre.

« Dans ma vingtaine, j’avais de la difficulté à me poser les pieds, à choisir une profession ou une carrière, tout me semblait insensé, » explique ce jardinier-maraîcher dans la quarantaine. « J’ai continué à chercher, à errer, à faire toutes sortes de petits boulots, comme planter des arbres dans l’Ouest canadien ». Au Cégep Saint-Laurent, en 1989, il participe au programme SENS : Sensibilisation aux Échanges Nord-Sud. En Bolivie, il visite des projets de coopération dans les régions rurales, des projets de femmes, d’accès à l’eau potable, de radio communautaire, de pépinières (production d’arbres pour le reboisement) et il s’entiche de la coopération internationale. « Ça a été pour moi une étincelle, je me suis dit : c’est ça que je veux faire ! De la coopération internationale, aider les gens ! ».

Ne sachant pas trop par où commencer, il rencontre des coopérants québécois qui travaillent sur le terrain, puis tombe sur le programme Agriculture et développement international, au Campus d’Alfred de l’Université de Guelph en Ontario. C’est le déclic : c’est l’agriculture qui l’amènera à travailler en coopération ! À sa sortie du programme, en 1994, il fait un premier projet au Guatemala, dans une coopérative agricole, puis un autre en Papouasie-Nouvelle-Guinée, dans une école où étaient enseignés la mécanique et l’agriculture aux jeunes de la rue. « Mais de fil en aiguille, j’étais désillusionné par la coopération. J’avais l’impression que nos efforts ne menaient pas à des changements si concrets dans les communautés. C’est quand même là que j’ai eu la piqûre pour l’agriculture et que j’ai fait mes premiers jardins. J’y ai appris toutes sortes de techniques avec les différentes communautés, ce fut un tournant marquant ».

À son retour, ses projets sont encore flous, mais il sait à présent qu’il souhaite faire de l’agriculture. « Je me demandais : mais où ? Comment ? Sous quelle forme ? Et je suis tombé sur Équiterre et la formule d’Agriculture soutenue par la communauté (ASC) ».

Il a de la chance : au même moment, son père prend sa retraite et souhaite aider ses enfants à réaliser leurs rêves. La sœur de Francis a comme passion les chevaux et lui : faire pousser des légumes bio. En 2005, ils achètent donc une terre à Saint-Chrysostome, à une heure de Montréal, leur lieu de vie. « Je ne connaissais pas encore grand-chose de l’agriculture, surtout au Québec, et tous les deux, on a démarré nos projets : elle son écurie et moi la production maraîchère bio ».

Proximité et sécurité alimentaire

Situé dans la MRC du Haut-Saint-Laurent, il a trouvé auprès des intervenants régionaux les ressources nécessaires à la réalisation de son projet. C’est là aussi qu’il a implanté son premier point de chute : à la ferme, pour ses concitoyens ! Francis fournit aussi des légumes frais et bio aux résidents du Mile-End (un quartier précurseur de l’ASC, qui a été desservi par le tout premier Fermier de famille lors d’un projet-pilote en 1995). Les Jardins d’Ambroisie produisent également des fines herbes et quelques fruits : melons, cerises de terre, cantaloups. Pour les autres fruits, comme les pommes, les bleuets et les fraises, ils s’approvisionnent chez d'autres fermes bio avoisinantes. « Dès la première année, je pouvais compter sur une trentaine de partenaires de l’ASC et lors de la deuxième, ce nombre a doublé, et ainsi de suite. Aujourd’hui, nous livrons 200 paniers bio à des particuliers et à des familles », dit-il avec fierté. L’ASC compte pour 75% de sa production et Francis vend ses surplus au marché.

« Grâce à l’ASC, on saute les intermédiaires. Cela crée une proximité entre l’agriculteur et le consommateur : on est proche, on se parle et on peut s’envoyer des courriels, échanger. On reçoit pleins de courriels super encourageants, on est tellement bénis de toutes ces belles pensées ; les gens sont vraiment reconnaissants ! », se réjouit-t-il.

« On a aussi l’assurance que les produits sont sains et ne sont pas cultivés avec des intrants nocifs pour la santé. On travaille avec plusieurs variétés de type « Héritage » qui sont plus nutritives et ont un bagage génétique authentique. La sécurité alimentaire est de plus en plus fragile dans le système conventionnel : les terres s’épuisent, les semences sont manipulées en laboratoire par les semenciers qui font des croisements, en choisissant des traits de certaines variétés qu’ils préfèrent, et le recours aux intrants chimiques est de plus en plus commun et utilisé » précise-t-il. « L’ironie, c’est que nous, petits agriculteurs, on doit payer pour certifier que notre produit ne contient pas de produit nocif et on est surveillé, tandis que le producteur conventionnel, lui, n’a rien à payer » s’étonne-t-il.

Pour Francis, qui pratique le Falun Dafa (issu du Qi-Gong), une discipline qui travaille le corps et l’esprit simultanément : « Il est essentiel de nourrir ton esprit, mais ton corps aussi. L’un ne va pas sans l’autre et conserver cet équilibre est important ». Sans doute, la formule de légumes frais et bio de l’ASC et sa philosophie d’entraide et de partenariat entre la communauté et nos Fermiers de famille y contribue-t-elle ?

Pour en savoir plus sur Les Jardins d’Ambroisie.

Ces propos ont été recueillis et rédigés dans le cadre d’un projet soutenu financièrement par la Conférence régionale des élus Vallée-du-Haut-Saint-Laurent et le Ministère de l’Agriculture, des pêcheries et de l’alimentation du Québec :