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Opinion  •  2 min

L’industrie automobile fait encore fausse route

Marc-André Viau

Directeur, Relations gouvernementales

On apprenait la semaine dernière que Chevrolet cessera la production de son unique modèle électrique compact : la Bolt. Avec cette énième mise au rencard d’un véhicule de petite taille et abordable, l’industrie automobile montre qu’elle priorise ses profits au détriment de la sécurité, de l’aménagement du territoire, des finances des ménages et de nos capacités énergétiques.

La Bolt était l’un des derniers véhicules à prix accessible disponibles sur le marché du 100% électrique. La demande pour ce modèle était forte et les listes d’attentes pour mettre la main sur celle-ci étaient parmi les plus longues chez les concessionnaires. Et pourtant, ce n’est pas le premier modèle du genre à subir un tel sort…

En voie de disparition

Volkswagen Golf, Chevrolet Spark et Volt, Mitsubishi I-miev, Smart électrique, Ford Focus, Nissan Leaf, Hyundai Ioniq : alors que la liste des victimes s’allonge chez les plus petits véhicules, on impose aux consommateurs des modèles toujours plus chers et plus gros.

Résultat? La « camionnisation » du parc automobile amorcée il y a quelques années s’accélère avec le déploiement des nouveaux modèles électriques et s'accompagne d’une série de conséquences désastreuses qui ne feront que s’accentuer si rien n’est fait.

Les enjeux de sécurité routière se multiplient, alors que de plus en plus de véhicules imposants dominent l’espace public. La pression sur nos ressources énergétiques renouvelables mais limitées ne fait que s’accentuer, alors que des mastodontes toujours plus gourmands en essence ou en électricité prolifèrent.

Cette disparition des petits véhicules est aussi incompatible avec des politiques d'aménagement intelligentes qui permettraient de réduire la pression sur nos milieux naturels, nos terres agricoles et l’extraction débridée de ressources pour fabriquer des batteries toujours plus grosses. Finalement, cette véritable course aux plus imposants véhicules balaie du revers de la main les principes d'équité et de justice environnementale : on offre la transition énergétique uniquement à ceux qui peuvent se la payer.

Incapables de s’auto-réglementer

Les constructeurs automobiles dépensent une quantité phénoménale d’énergie pour s’opposer à toute forme de réglementation car ils aiment prétendre être en mesure de s'autogérer pour mener à bien la nécessaire transition de leur industrie. Ils démontrent toutefois depuis des décennies qu’ils en sont incapables.

La disparition de la Bolt est une énième preuve que le laxisme à leur endroit est une erreur. La réglementation du secteur automobile doit inclure les enjeux de taille et de poids. Elle ne peut se concentrer uniquement sur les GES.

Nos gouvernements doivent cesser de s’adapter à l’industrie. C'est plutôt l'industrie qui devrait s'adapter aux besoins réels des consommateurs et aux impératifs du 21e siècle.

Prenons le taureau par les cornes. Le gouvernement fédéral doit se dépêcher d’adopter une norme sur les véhicules zéro émission et travailler avec son homologue américain pour mieux encadrer le secteur. Il faut aussi de manière urgente développer une réglementation sur le poids des véhicules, qu’ils soient électriques ou à essence. Il faut instaurer un système de redevance-remise qui facilite les choix écologiques au détriment des pires options. Il faut encourager une offre de véhicules électriques la plus large possible. Il faut rapidement encadrer la publicité qui alimente le problème.

Il y a tant à faire, mais il faut tracer la marche à suivre. Nous sommes à la croisée des chemins et si nous nous laissons guider par l'industrie automobile, aucun doute, nous prendrons collectivement le champ.

Publié dans La Presse le 1er mai 2023

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