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Dernier droit des négociations et les grands blocs - Union européenne, États-Unis, BASIC (Brésil, Afrique du Sud, Inde, Chine), les pays les moins avancés, l’Alliance des petits pays insulaires (AOSIS), etc. - se préparent à ce qui promet être une longue, longue nuit. Pour plusieurs enjeux fondamentaux, rien n'a pu être réglé au cours des deux dernières semaines - et même au cours de la dernière année - le travail étant laissé aux ministres et à leurs diplomates.
Regardons un peu comment les choses se présentent, en se rappelant que « ce n'est pas fini tant que ce n'est pas fini », et que les prochaines heures peuvent nous réserver des surprises.
Le Protocole de Kyoto survivra-t-il après 2012 ?
Il semble que oui, mais avec beaucoup moins de joueurs, le Canada, le Japon, la Nouvelle-Zélande et la Russie ayant clairement signifié ne pas vouloir s'y engager. Reste l'Union européenne, l’Australie et les pays scandinaves qui ont signifié qu'ils feraient partie d'une deuxième période d'engagement du Protocole (2013-2020), et ce, même si les autres pays développés ne leur emboîtent pas le pas. Le Protocole est pour le moment le seul instrument international contraignant qui enjoint les États développés signataires à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
Si une deuxième période d'engagement du Protocole de Kyoto ne couvre que les émissions des pays européens (et peut-être de quelques autres), comment encadrer les émissions de l'ensemble des grands émetteurs, y compris des économies émergentes comme la Chine, l'Inde et le Brésil ?
S'il existe un consensus ici, c'est celui de négocier une nouvelle entente internationale qui couvrira éventuellement tous les grands pays émetteurs. Certains voudraient que Durban donne le coup d'envoi des négociations en vue de l'adoption de cette nouvelle entente d'ici 2015, pour une entrée en vigueur vers 2017. D'ici là, il y aura en quelque sorte un « vide » juridique entre 2013 et 2017 qui serait comblé, en partie, par la deuxième période de Kyoto.
Qu'arrive-t-il des économies émergentes comme la Chine ? Ont-ils des objectifs de réductions ?
Pas encore. La Chine a indiqué être prête à accepter des objectifs contraignants à partir de 2020, une ouverture majeure ici à Durban. Une nouvelle entente internationale, dont les négociations pourraient être lancées ici à Durban, contiendrait potentiellement des modalités encadrant les émissions de l'économie chinoise.
Rappelons que les émissions de la Chine et des autres économies émergentes ne sont pas couvertes par le Protocole de Kyoto, étant des économies toujours en développement encore très loin des niveaux atteints par les pays industrialisés. Et également parce qu'elles ont historiquement beaucoup moins contribué à l'accumulation des émissions dans l'atmosphère depuis 1850 que les pays industrialisés.
Cela étant dit, ces pays sont de plus en plus actifs dans la mise en œuvre de mesure pour lutter contre le réchauffement climatique. Le Brésil par exemple a adopté un objectif de réduction de ses émissions de plus de 35% en plus de réduire de moitié le taux de déforestation en Amazonie au cours des dernières années. La Chine a mis en place une série de mesures qui ferait pâlir d’envie certains pays comme le Canada et les États-Unis comme des cibles d’efficacité énergétique pour l’ensemble de son secteur industriel, des cibles pour réduire la pollution des automobiles (plus sévères que celles du Canada) et discute présentement de la mise en place d’une bourse du carbone ce que le gouvernement Harper se refuse toujours de faire.
Y aura-t-il plus d'argent pour l'adaptation et le verdissement des économies des pays les moins développés ?
Plusieurs pays donateurs - dont le Canada - ont annoncé des aides financières supplémentaires à court terme, un engagement pris à la Conférence de Copenhague. La présente conférence devrait rendre opérationnel un nouveau fonds - le Green Climate Fund, qui devra gérer une bonne partie des sommes promises à l'horizon 2020, celles-ci devant s'élever à quelque 100 milliards de dollars par année. Par contre, il semble bien qu'il n'y aura pas d'entente cette année sur la provenance de ces sommes. Donc un nouveau Fonds, avec des règles de fonctionnement, mais pas encore d'argent à gérer.
Dans ses grandes lignes, l'entente attendue ici à Durban devrait (1) statuer sur le prolongement du Protocole de Kyoto, (2) lancer un processus de négociations en vue d'une nouvelle entente internationale encadrant l'ensemble des pays émetteurs et (3) opérationnaliser le fonctionnement d'un nouveau Fonds mis à la disposition des pays les moins avancés pour les aider à s'adapter aux impacts des changements climatiques et à développer des économies sobres en carbone.
Les prochaines heures nous donneront les résultats de ces négociations exceptionnellement complexes.