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Opinion  •  5 min

Substances chimiques dans les produits de consommation et les cosmétiques vendus au Canada – un constat alarmant

Publié le 

par :  (Unpublished) Annie Bérubé Directrice des relations gouvernementales – Ottawa annie-198x116.png

4-(4-Méthoxyphényl)-3-butène-2-one, dextropropoxyphène, chlore de disteraryldimonium??? C’est bon pour la peau? On en retrouve dans notre dentifrice? Que faire?

Un nouveau rapport de la commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada révèle que Santé Canada n’a pas réussi à protéger les Canadiens contre l’exposition à des produits toxiques contenus dans les produits de consommation courante, incluant les cosmétiques.

La commissaire a effectué un audit pour vérifier si le programme de la sécurité des produits de consommation de Santé Canada permettait de contrer ou de prévenir les dangers pour la santé et la sécurité humaines associés aux substances chimiques préoccupantes présentes dans les produits cosmétiques et de consommation.

De quoi s’agit-il exactement? Pour ce qui est des produits de consommation, on inclut dans cet audit les jouets pour enfants, les produits ménagers, les articles de sport, les ampoules, les produits électriques, les vêtements et plusieurs autres, mais non les véhicules motorisés et leurs pièces, les aliments, les médicaments (y compris les produits de santé naturels) et les pesticides, qui sont réglementés par d'autres lois canadiennes.

En ce qui concerne les produits cosmétiques, la réglementation couvre « les substances ou mélanges pouvant servir à embellir, purifier ou modifier le teint, la peau, les cheveux ou les dents, y compris les déodorants et les parfums ». Cela inclut les produits cosmétiques appliqués par les professionnels des soins esthétiques et les produits en vrac utilisés par certains services institutionnels (comme le savon à mains dans les toilettes des écoles).

Lors d’une conférence de presse le 31 mai, la commissaire tenait à informer les Canadiens et Canadiennes que la loi ne requiert pas que Santé Canada effectue quelque test que ce soit sur l’innocuité d’un produit cosmétique avant qu’il ne soit mis en vente au Canada ; la loi exige seulement que les entreprises déclarent les ingrédients contenus dans les produits cosmétiques vendus au Canada 10 jours après leur entrée sur le marché canadien. Cette même loi stipule par ailleurs que certains ingrédients toxiques ne devraient pas apparaître au sein de la liste d’ingrédients des cosmétiques.

Toutefois, la commissaire constate que Santé Canada n’a pas régulièrement testé les cosmétiques afin de confirmer l’exactitude des déclarations soumises par les entreprises, de détecter la présence de substances interdites et de vérifier la concentration des ingrédients soumis à des restrictions. De plus, Santé Canada n’avait pas tenté de détecter la présence de contaminants microbiens (yuk!) et de métaux lourds. (Les substances les plus néfastes sont le plomb, le cadmium, le mercure et l’arsenic.)

La commissaire a noté que Santé Canada tarde à retirer du marché les produits cosmétiques contenant des substances interdites (en moyenne neuf mois sont nécessaires). Il est important que Santé Canada respecte son engagement en intervenant rapidement pour donner suite aux incidents et aux infractions réglementaires.

Amazon, ebay et magasinage en ligne : attention!

De plus, Santé Canada n’a pas évalué l’étendue ni l’ampleur des risques associés au commerce électronique et il a exercé une surveillance très limitée de ce marché, pourtant en plein essor. Comme vous le savez, la magie de l’Internet nous permet maintenant d’importer n’importe quoi, y compris des cosmétiques de partout à travers le monde alors que ces produits ne sont pas assujettis à la réglementation canadienne.

Ainsi, le ministère n’a pas adéquatement évalué les risques pour la santé et la sécurité posés par les produits de consommation et les cosmétiques contrefaits, et ce, en dépit des inquiétudes soulevées au Canada et à l’étranger à ce sujet. La commissaire note que ces produits peuvent être manufacturés dans des conditions insalubres.

« Hypoallergène », « sans parfum » c’est mieux non? Pas nécessairement….

Donc, on regarde les étiquettes sur nos petits pots de crème et le shampoing pour nos enfants et on y lit «parfum » ou « fragrance ». Les ingrédients entrant dans la composition de ces « parfums », « arômes », « fragrances » ou « saveurs », peuvent contenir des substances chimiques préoccupantes, mais n’ont pas à être divulgués à Santé Canada ni aux consommateurs. Pourquoi? Secret commercial!

Or, beaucoup de substances chimiques qu’on retrouve couramment dans les fragrances peuvent susciter des allergies ou des crises d’asthme et ont été liées au cancer. Santé Canada ne peut pas donner aux consommateurs l’assurance que ces produits sont conformes aux dispositions de la loi et qu’ils sont sécuritaires.

De plus, Santé Canada a fait savoir que son mandat n’englobait pas l’examen des mentions comme « hypoallergénique », « sans agent de conservation », « sans parfum » ou « non parfumé » qui sont apposées sur ces produits. Ces mentions donnent à penser aux consommateurs que les produits présentent des bienfaits pour leur santé et leur sécurité, mais elles peuvent être trompeuses. Par exemple, un produit portant la mention « sans parfum » ou « non parfumé » peut contenir des substances chimiques pour en masquer l’odeur!!!

Incidents à rapporter

Si un produit de consommation provoque une blessure, un empoisonnement, des brûlures ou autres réactions, aux termes de la loi, les entreprises ont deux jours, à compter du moment où elles en prennent connaissance, pour déclarer à Santé Canada tout incident lié à leur produit. Il incombe aux entreprises de communiquer par la suite un deuxième rapport, dans un délai de 10 jours, qui décrit notamment les mesures qu’elles comptent prendre.

La commissaire a constaté que Santé Canada n’avait pas vérifié si les entreprises avaient respecté les échéances fixées par la loi pour la déclaration d’incidents.

Si un rapport d’incident est émis, toutefois, Santé Canada prendra les mesures nécessaires pour retirer ces produits du marché et émettra des avis à la population. Il est important de consulter ces avis et rappels afin de déterminer si vous possédez à la maison certains des produits de consommation qui posent un risque pour votre santé.

Néanmoins, les entreprises ne sont pas tenues par la loi de déclarer à Santé Canada les incidents liés à l’utilisation de cosmétiques, comme ils doivent le faire pour les produits de consommation. La commissaire a indiqué qu’il y avait eu effectivement des rapports d’effets indésirables liés à l’utilisation de cosmétiques rapportés par les consommateurs canadiens.

La commissaire appelle les Canadiens et Canadiennes à la vigilance

La commissaire exige donc que les Canadiens et Canadiennes soient vigilants dans leur consommation… On fait quoi alors? Un doctorat en toxicologie?

Équiterre n’est pas d’accord. Le fardeau ne doit pas revenir aux individus d’essayer de déchiffrer un étiquetage incompréhensible et de se protéger de ces risques, mais bien à Santé Canada d’améliorer de façon urgente cette réglementation. Nous y veillerons.

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