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Vous vous êtes peut-être rendu compte que je réagis toujours à l’actualité en retard... Apparemment je ne ferais pas une bonne journaliste! Aujourd'hui, par exemple, je veux vous parler d’une nouvelle parue il y a plus d’une semaine, soit le 2 juin. Les nouvelles, ce jour-là, nous annonçaient que les États-Unis allaient réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 30 %. Cela m’est apparu comme un rêve...
En bonne scientifique, j’aime aller chercher les faits avant de parler, ou d’écrire dans ce cas. C’est pour cela que ça me prend du temps. Je tourne mon ordinateur sept fois dans ma tête avant d'écrire.
Les nouvelles du 2 juin faisaient référence à la présentation du Plan présidentiel Action Climat des États-Unis. Ce que j’ai vérifié en premier, c’est l’ambition absolue des cibles de réduction. À ce sujet, le Plan Action Climat est on ne peut plus clair. Le président Obama réaffirme les engagements pris par les États-Unis en 2009 de réduire leurs émissions de 17 % du niveau de 2005 en 2020. La réduction de 30 % dont parlaient les nouvelles n’est que sectorielle.
Donc, par l’annonce du Plan Action Climat, les États Unis n’augmentent pas l’ambition de leurs efforts de réduction. Mais malgré tout, vive Obama! Car il donne à son pays les moyens d’atteindre les cibles de réduction et cela constitue un pas en avant majeur!
Vous savez, rien n’est un hasard. Si Obama a rendu public le Plan Action Climat le 2 juin, c’est que le 4 juin s’ouvrait à Bonn, en Allemagne, un nouveau round de négociations climatiques. Clairement les États-Unis cherchaient à donner de l’espoir à ces négociations. Merci pour cela et encore bravo!
Dans ce Plan Action Climat, la rhétorique utilisée est audacieuse : on compare le carbone à l’arsenic et au mercure... De ce fait, réduire les émissions devient un enjeu de santé publique. En plus, l’argumentaire met l’accent sur la compétitivité économique, indiquant qu’avec ce Plan, les États-Unis se donnent les moyens de devenir chefs de file dans le développement de technologies alternatives.
La grande question pour nous est de voir si cela influencera la position du Canada. Je m’imagine que les nouvelles cibles de réduction aux États-Unis augmenteront l’impopularité du pétrole provenant des sables bitumineux... Est-ce que le spectre de pression économique réveillera le gouvernement Harper et l’Alberta? L’annonce du Plan Action Climat creuse le fossé entre le Canada et les États-Unis en matière de lutte aux changements climatiques. Nous avons des cibles de réduction similaires, mais au Canada, il n’y a pas une politique cohérente essayant de modifier les habitudes afin d’effectuer une transition énergétique.
Jusqu’à quand le Canada portera-t-il le bonnet d’âne des pays développés?
Chroniqueuse invitée sur le site d’Équiterre, Catherine Potvin est professeure titulaire et chercheuse au département de biologie à l'Université McGill. Première femme à recevoir la médaille Miroslaw-Romanowski de la Société royale du Canada, elle est également fondatrice du laboratoire néo-tropical de l'Université McGill au Panama. Elle partage son temps entre le Québec et l’Amérique centrale, à tel point que le gouvernement du Panama l’a recrutée comme l'une de ses négociatrices à l'ONU sur le climat.