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Communiqué de presse  •  4 min

Le G20 fait marche arrière et passe encore par le financement des combustibles fossiles pour sa relance économique post-COVID-19

Publié le 

Une nouvelle étude révèle que les gouvernements du G20 dépensent encore plus d’un demi-billion de dollars US par année pour le pétrole, le gaz et le charbon

Montréal, 10 novembre 2020 — Malgré les promesses répétées des gouvernements du G20 de cesser de subventionner les combustibles fossiles, le financement n’a diminué que de 9 % depuis 2014-2016; ces trois dernières années, ce financement totalisait 584 milliards de dollars par an selon un rapport publié aujourd’hui par l’Institut international du développement durable (IIDD), l’Overseas Development Institute (ODI) et Oil Change International (OCI). De l’avis des chercheurs, ces maigres progrès seront probablement annulés cette année par les milliards de dollars engloutis dans l’énergie fossile en réponse à la pandémie de la COVID-19.

« Avant même la crise de la COVID-19, les gouvernements des pays membres du G20 n’étaient pas sur la bonne voie pour respecter les engagements de l’Accord de Paris visant à mettre fin aux financements publics des énergies fossiles », affirme Anna Geddes de l’IIDD, principale auteure du rapport Doubling Back and Doubling Down: Scorecard on Fossil Fuel Funding. « Il est décevant de constater qu’ils vont à présent dans la direction opposée. On prévoit le maintien, voire l’augmentation en 2020, des fonds du G20 pour les combustibles fossiles alors qu’on avait constaté une légère baisse ces dernières années. »

« Le moment est venu pour les gouvernements d’opérer la transition énergétique en cessant de renflouer les industries des combustibles fossiles du passé et en investissant dans l’avenir, soit la santé publique, les programmes sociaux et les énergies renouvelables », affirme Émile Boisseau-Bouvier, analyste des politiques climatiques chez Équiterre.

Selon les récentes données du Energy Policy Tracker, les gouvernements du G20 ont accordé au moins 233 milliards de dollars depuis le début de la pandémie pour soutenir, par l’entremise de mesures de relance, les industries les plus énergivores en matière de combustibles fossiles.

Dans le rapport Doubling Back and Doubling Down, les chercheurs ont considéré les récents engagements de relance économique post-pandémie ainsi que les politiques qui l’ont précédée pour classer les progrès des pays du G20 en matière de suppression progressive du soutien à l’énergie fossile.

Ils ont examiné sept indicateurs : la transparence; les promesses; les fonds publics pour le charbon, le pétrole et le gaz; la production et consommation d’électricité à partir de combustibles fossiles; ainsi que l’évolution du soutien financier au fil du temps. Les progrès réalisés par la plupart des pays évalués au cours des trois dernières années ont été décrits par les experts comme « piètres » ou « très médiocres »; aucun pays n’a accompli le progrès nécessaire pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.

Le Canada à la traîne


Selon ce rapport, le Canada reste à la traîne par rapport à ses pairs dans la cessation du soutien de l’énergie fossile. Le pays se classe au cinquième rang parmi les onze pays du G20 aussi membres de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

Le Canada fait piètre figure en matière de performance environnementale dans ces deux catégories : le soutien du pétrole et du gaz et l’évolution du financement des combustibles fossiles au fil du temps. Les experts estiment que le Canada a énormément de pain sur la planche pour rendre son économie plus verte, puisqu’il consacre plus de fonds publics par PIB à l’énergie fossile que les autres pays du G20. Malgré la suppression progressive de quelques mesures de soutien aux combustibles fossiles au cours de la période étudiée, l’étude montre une nette réorientation des fonds publics vers les infrastructures d’exportation et le gaz naturel.

« Pourtant, le Canada s’est engagé à décarboniser son économie après la COVID-19 pour viser des émissions de GES nettes nulles d’ici 2050 », déclare Vanessa Corkal, chercheuse à l’IIDD. « Si le gouvernement veut démontrer son sérieux, alors Exportation et développement Canada doit se conformer aux visées climatiques; de plus, les gouvernements fédéral et provinciaux doivent réduire les subventions aux combustibles fossiles, y compris le gaz naturel. »

De tous les membres du G20 de l’OCDE, c’est l’Allemagne qui obtient les meilleurs résultats en matière de suppression progressive du financement des combustibles fossiles, tandis que le Mexique, la Turquie et le Royaume-Uni sont relégués aux derniers rangs. Parmi les pays du G20 non membres de l’OCDE, le Brésil est celui qui détient le meilleur résultat alors que l’Arabie saoudite se classe au dernier rang.

En tête du palmarès, l’Allemagne a marqué des points en faisant preuve de transparence, en prenant des engagements fermes et en relâchant quelque peu son soutien à la production pétrolifère et gazière et à l’utilisation de combustibles fossiles. Le soutien du pays aux combustibles fossiles a chuté de 35 % par rapport à 2014-2016.

Renverser la vapeur


« Aucun pays du G20 n’obtient les résultats attendus, encore qu’il ait quelques pays qui se démarquent et dont on pourrait s’inspirer », affirme Angela Picciariello de l’ODI. « Pour être à l’avant-garde, il faut, comme l’Allemagne, agir en toute transparence et prendre des engagements fermes; il faut viser plus loin que le Brésil et l’Italie en mettant sur pied un plan qui met fin rapidement au financement de l’industrie du charbon, mais aussi des industries pétrolière et gazière. Pour se conformer à l’objectif de limiter la hausse des températures à 1,5 °C et éviter que la crise climatique ne dégénère, les gouvernements des pays du G20 devraient écarter pour de bon tout financement des combustibles fossiles. »

Si les lents progrès de la suppression progressive du financement des combustibles fossiles ont à présent été renversés, comme l’indiquent ce rapport et d’autres données récentes sur les engagements publics pour contrer la COVID-19, les chercheurs conviennent que les gouvernements auront bientôt l’occasion de renverser la vapeur.

« Les gouvernements sont en train de dilapider les finances publiques pour se remettre de la pandémie. Au lieu de financer une autre crise majeure —la crise climatique —, nos gouvernements devraient investir dans un avenir résilient », admet Bronwen Tucker de l’OCI.

« L’annonce récente par la Chine d’un plan de réduction à zéro de ses émissions de GES et la communication par l’UE du Pacte vert pour l’Europe témoignent de cette impulsion à agir pour le bien de l’environnement », déclare M. Geddes. « L’actuel sommet "Finance in Common", le sommet du G20 le 28 novembre et le cinquième anniversaire de l’Accord de Paris en décembre sont autant d’occasions de donner un nouvel élan à l’économie verte. Si les gouvernements n’ont guère accompli de progrès au cours des trois dernières années, osons espérer qu’ils prendront un tournant significatif au cours des trois prochaines années. »


Pour plus d’information:

Anthony Côté Leduc, Équiterre
514-605-2000
acoteleduc@equiterre.org