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Afin que la filière éolienne québécoise se développe harmonieusement et atteigne son plein potentiel, il est primordial que les projets éoliens soient bien acceptés par leur communauté d’accueil. L'aspect esthétique des éoliennes peut en déranger certains, tout comme les dérangements pendant la phase de construction. Les redevances versées aux communautés et la valeurs des propriétés terriennes sont également des questionnements légitimes des communautés d'accueil.
L'acceptation doit donc s’appuyer sur trois piliers :
- Une information juste et de qualité sur le projet à venir et sur la production d’énergie éolienne elle-même ;
- Un effort soutenu de la part du promoteur afin de réduire les nuisances liées au projet, tant lors de la phase de construction que d’opération ;
- Des retombées économiques qui bénéficient à tous les citoyens directement concernés par le parc éolien.
La qualité du dialogue entre les promoteurs d’un projet et les citoyens de la communauté d’accueil doit donc être excellente afin de bien répondre à ces trois préoccupations.
L’expérience québécoise de la dernière décennie nous enseigne que les projets éoliens existants sont bien acceptés par leur communauté. À ce titre, un sondage réalisé en 2008 par Senergis, à l’instar de plusieurs études internationales, démontrait que l’acceptabilité des projets s’améliorait à la suite de l’implantation d’un parc d’éoliennes, la proportion de gens favorables passant de 83 % à 86 %.
L’aspect esthétique des éoliennes
L’intégration des éoliennes dans le paysage et l’appréciation de leur apparence sont des critères majeurs dans l’acceptation de ce mode de production d’énergie. Ces critères étant subjectifs et propres à chaque individu, il est difficile d’établir des normes objectives à cet effet. Une modélisation visuelle du paysage peut permettre au promoteur et à la population de bien envisager l’impact visuel des futures éoliennes et d’ajuster le projet au besoin. Il est aussi important d’observer l’effet cumulatif des éoliennes sur le paysage. Ainsi, une étude européenne démontre que les plus petits parcs éoliens sont perçus plus positivement que les plus grands.
L’intrusion visuelle des éoliennes dans les paysages ne semble cependant pas nuire au tourisme. Dans une étude menée auprès de touristes en séjour en Gaspésie en 2004, près de 95 % d’entre eux ont eu une bonne impression des éoliennes, alors que 42 % en avaient une excellente. Ces résultats ont été confirmés depuis par une étude similaire menée à l’Île-du-Prince-Édouard.
Plusieurs régions du Québec se sont récemment dotées de chartes du paysage qui visent à promouvoir un développement économique en harmonie avec la beauté des territoires. Ainsi, la charte gaspésienne invite au développement de nouveaux parcs éoliens, mais propose de créer un comité de travail afin « d’encadrer l’implantation et la meilleure intégration possible (…) des éoliennes (…) dans les paysages gaspésiens ».
Redevances versées aux communautés
L’impact économique que peut avoir l’implantation d’un parc éolien dans une collectivité est non négligeable. Pour Équiterre, il est important que l’ensemble de la population locale bénéficie des retombées de ces projets. Lorsque les communautés sont propriétaires des parcs éoliens, les redevances et les risques des projets leur sont entièrement incombés.
Lorsque le propriétaire du parc est un tiers, nous croyons qu’une redistribution équitable d’une partie des bénéfices tirés de l’exploitation de l’énergie éolienne avec la collectivité d’accueil favorise le développement d’une solidarité avec la communauté ciblée. Cette répartition peut se faire de plusieurs façons, par exemple via une redevance à la MRC ou aux municipalités touchées, visant à financer des investissements communautaires pour le bénéfice de l’ensemble de la population.
Dans une perspective d’équité et de transparence, nous croyons que l’ensemble de la population devrait être impliquée dans la prise de décision concernant l’utilisation de ces redevances. Il va sans dire que les compensations versées aux propriétaires terriens qui accueillent les éoliennes et les lignes de transmission, lorsque réinvesties dans l’économie locale contribuent grandement à la vitalité de l’économie de ces petites communautés.
L’effet des éoliennes sur la valeur des propriétés
L’effet possible d’un parc éolien sur la valeur des propriétés situées à proximité est un enjeu important de l’acceptabilité locale des projets. Les études au sujet d’une possible dévaluation de la valeur des propriétés sont relativement peu nombreuses. L’une d’entre elles démontre une diminution du prix des propriétés dans l’intervalle de temps entre l’annonce d’un projet et sa mise en service, les prix revenant à la normale à ce moment. Une autre étude fait plutôt état d’un effet négatif sur les prix, qui oscillerait entre 7,5 % et 13 %. Cependant, aucune étude sur le sujet n’a été produite au Québec et il est très difficile d’avoir un portrait clair de la situation. De très nombreux paramètres peuvent affecter positivement ou négativement le prix des propriétés, rendant difficile d’isoler la seule variable éolienne.
Évidemment, les propriétaires terriens accueillant les éoliennes ou les lignes de transport électrique sont monétairement dédommagés par le promoteur, ce qui peut compenser toute perte de valeur possible de leur propriété. Pour les autres propriétaires qui se sentiraient lésés, le recours aux tribunaux est toujours possible, mais aucun jugement ne semble avoir encore porté sur cette question au Québec.
Les dérangements pendant la construction
Afin de produire la plus grande quantité d’électricité, la tour des éoliennes est souvent aussi haute qu’un immeuble de 20 étages. Évidemment, la mise sur pied de telles structures, en béton ou en acier selon les modèles, entraîne certains dérangements pour la population locale. Les dérangement pourront varier en fonction des principales phases de construction du parc éolien : la construction des chemins d’accès, le coulage et la préparation de la base, l’érection de l’éolienne elle-même et le raccordement au réseau électrique.
L’une des principales sources de dérangement s’avère être le transport routier. Par exemple, il est estimé par le promoteur que près de 55 000 passages routiers (incluant le déplacement des travailleurs, des composantes, de la machinerie, etc.) ont été nécessaires pour compléter le projet de parc éolien de la Seigneurie de Beaupré – 4, alors que le projet La côte de Beaupré nécessitera 23 000 passages. Pour les communautés vivant en bordure de routes d’accès normalement peu passantes, le trafic accru lié à la phase de construction peut représenter une baisse notable, bien que passagère, de leur qualité de vie. La poussière, le passage de véhicules lourds à toute heure du jour et l’augmentation des risques d’accidents de la route font partie des dérangements les plus souvent rapportés.
Heureusement, les promoteurs soucieux de l’acceptabilité de leurs projets peuvent mettre en place des mesures d’atténuation liées à ces dérangements, comme une limitation de la vitesse des poids lourds sur les plus petits chemins, la restriction de la circulation à des heures plus sensibles pour les citoyens, etc. Ces mesures sont encore plus efficaces lorsqu’elles font l’objet de discussions avec les principaux concernés, par l’entremise d’un comité de citoyens par exemple. Pour illustrer ce propos, dans le cadre du projet de Baie-des-Sables, des bétonnières passaient sur une route où était située une garderie. D’un commun accord avec la communauté, le promoteur a convenu que durant la période d’arrivée et de départ des enfants, les camions ne circuleraient pas sur cette route.