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Lettre écrite par Steven Guilbeault, coordonnateur général adjoint d'Équiterre et Hannah McKinnon responsable des communications du Réseau action climat Canada, parue dans le journal Le Devoir du 1er décembre 2010.
Pour négocier, il faut avoir quelque chose à mettre sur la table, une contribution à faire. Le Canada arrive les mains pratiquement vides à ce Sommet des Nations unies sur le climat à Cancun, alors que la crise climatique touche des millions de personnes dans le monde, et ici, au Canada.
Alors que plusieurs autres pays avancent et agissent, d’autres se contentent de rester assis à regarder les impacts s’intensifier. Et de laisser passer l’occasion de contribuer à un avenir énergétique propre. Dans la dernière catégorie, on peut dire que le Canada se complaît tout au fond du baril.
Un bref survol historique de l’inaction de Stephen Harper dans le dossier des changements climatiques montre bien toute la difficulté qu’aura le gouvernement canadien d’être considéré comme un partenaire crédible et sérieux encore une fois cette année.
- Au cours des derniers mois, les sénateurs conservateurs, non élus, ont tué le projet de loi C-311 lors d’un vote de dernière minute, sans même l’avoir étudié ou débattu, ce qui ne s’était jamais vu depuis plus de 70 ans.
- Des documents récemment rendus publics démontrent que ce gouvernement s’immisce dans les affaires d’autres pays et juridictions pour tenter de les convaincre d’abandonner leurs politiques favorisant les énergies propres et luttant contre les changements climatiques, et ce, afin de protéger les intérêts de l’industrie des sables bitumineux.
- Le gouvernement continue d’alimenter le problème en octroyant environ un milliard de dollars en exemptions d’impôts pour les pétrolières, malgré son engagement d’y mettre fin, de concert avec d’autres leaders, dans le cadre du Sommet du G20.
- Le gouvernement n’a aucun plan crédible ne serait-ce que pour atteindre notre maigre objectif de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, et ce, même si le Canada est l’un des dix plus grands pollueurs de la planète. Depuis le Sommet des Nations unies à Copenhague l’an dernier, le Canada est le seul pays à avoir diminué son objectif de réduction de ses émissions de GES.
- Le gouvernement a systématiquement muselé les spécialistes canadiens du climat, coupant drastiquement leurs budgets de recherche, en plus de louer le plus important navire de recherche du Canada à des entreprises pétrolières en quête de pétrole dans l’Arctique.
- Ce gouvernement s’est engagé à contribuer financièrement à l’adaptation aux changements climatiques et au transfert de technologies propres vers les pays en voie de développement. Par contre, ces argents sont principalement des prêts gérés par des agences du secteur privé et de grandes institutions financières multilatérales. Les sommes consenties sous forme de dons proviennent directement du budget actuel d’aide au développement.
- Ce gouvernement a choisi de renommer John Baird à titre de ministre de l’Environnement, un ministre reconnu pour ne pas prendre au sérieux le dossier des changements climatiques.
- Le principal programme fédéral pour le développement des énergies renouvelables n’a plus un sou.
- Le seul programme d’efficacité énergétique destiné aux propriétaires de maisons est lui aussi à sec.
- Sous le gouvernement Harper, le Canada a systématiquement été identifié comme le pays ayant la pire performance de ces négociations internationales, en remportant le prix du Fossile de l’année, et ce, pendant trois années consécutives.
Les impacts des changements climatiques n’ont jamais été aussi clairs : feux de forêt en Colombie-Britannique, inondations dans les Maritimes et les Prairies, et des centaines de millions de personnes affectées partout à travers le monde. Si les gouvernements agissent maintenant, il n’est pas trop tard pour éviter le pire.
Le premier ministre Harper doit cesser d’agir de façon insouciante face aux changements climatiques, et doit maintenant représenter les intérêts des Canadiens en agissant concrètement et dès maintenant au pays, et en cessant de miner les efforts des autres pays qui, eux, tentent de faire leur juste part.