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C'est dans l'espoir de gagner une circonscription du Centre-du-Québec que nos partis politiques rivalisent d'audace pour gagner le cœur des électeurs. Cette semaine le choix s'est arrêté sur le retrait des carburants du marché du carbone.
L'essence coûte trop cher et le coupable est le vilain marché qui permet de limiter la pollution et de diminuer nos GES, de financer l’adaptation de nos communautés aux phénomènes climatiques extrêmes, de diminuer la dépendance aux carburants fossiles.
Faisons aussi abstraction du fait que le prix de gaz en cette fin mai 2025 est le même que celui d'il y a 11 ans alors qu’il faisait rager les automobilistes de 2014, avant même l'inclusion des carburants dans le marché du carbone. Mais non, le coupable c'est ce prix sur la pollution que nous imposent les gouvernements...
Nos politiciens rivalisent donc d'audace pour trouver une façon de sacrifier cet agneau sur l'autel de l'abordabilité ou encore du trumpisme, duquel il s'inspire justement. Sabrer la réglementation environnementale est, après tout, un des sports préférés de l'actuelle administration américaine. Et moi qui croyais que nous ne voulions pas devenir le 51e État, mais je m'égare.
Le coût de l'essence est donc trop cher. Ce n'est pourtant pas lui qui a presque fait doubler le prix des véhicules neufs en 5 ans. Ce n'est pas lui au final non plus qui a fait augmenter le prix des aliments, frappés d'une inflation de 3,8% alors que le taux d’inflation global était de 1,7%. Quelle surprise! Mais cette semaine le coupable est trouvé. La semaine prochaine, on en trouvera bien un autre.
De leaders à suiveux?
On assiste en ce moment à la réécriture d’une histoire où nous serions désavantagés par le marché du carbone. Comme si nous n'avons pas sciemment décidé d'embarquer dans cette aventure en 2013 avant même que le gouvernement fédéral n'ait eu l'idée d'un mécanisme de tarification carbone pour toutes les provinces canadiennes. Nous avons fait le choix d'un développement différent. De mettre en place un marché du carbone en 2013 et de le lier avec celui de la Californie en 2014, après en être arrivé à la conclusion, assez logique, que la pollution nous coûte cher et qu'il faut que les pollueurs compensent, un tant soit peu, les torts qu’ils nous causent ; le fameux principe du pollueur payeur.
Le Québec n’a pas attendu que tout le monde embarque pour ne pas être désavantagé. Nous avons tout simplement fait nos propres choix. Comme nous avons fait nos propres choix, au milieu du siècle dernier, de miser sur l'électricité renouvelable pour alimenter notre développement économique et social.
Nous sommes allés aux urnes en 2014, 2018 et 2022 sans que le marché du carbone soit remis en cause. Une discussion large s’impose avant de mettre aux poubelles des années de travail, un système fiscal qui répond à des besoins en finançant des solutions, des innovations ou des alternatives qu’il faudra inévitablement financer nonobstant le choix que feront les élus de l’Assemblée nationale à court terme.
Peut-être que l'audace de revenir en arrière en rendant la pollution gratuite en s’inspirant des modèles canadien et américain est ce que souhaitent les électeurs de la circonscription d'Arthabaska. Mais il deviendra de plus en plus difficile de vouloir, d'un côté, être pareil comme le «Rest of Canada» et les États-Unis et, de l'autre, revendiquer notre fierté nationale.
C’est quoi l’inverse de la fierté déjà?
Cette lettre d'opinion a intialement été publiée dans La Presse le X mai 2025.