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On a droit à un festival de l’opinion critique des pistes cyclables par les temps qui courent. Tout ça de la part de gens aux horizons divers: celle d’un politologue spécialiste de l’Asie, d’un ancien témoin vedette reconnu coupable de fraude, de complot et de corruption ou encore d’un propriétaire d’un club de plage et vendeur de poutine congelée.
Vous serez surpris d’apprendre que le point commun entre ces gens est d’avoir l’épiderme très sensible à la vue d’une piste cyclable, malgré des bénéfices économiques clairs. Il est donc de notre devoir de les rassurer par rapport à leur véloanxiété.
Il faut d'abord souligner que l’espace public est, par définition, public et qu’il revient aux autorités compétentes de décider comment l’aménager. Malgré tout, une grande partie de l’espace public est étonnamment offert gratuitement à bien des endroits pour entreposer des propriétés privées que sont les véhicules.
Rappelons aussi le fait qu’un maigre 1,3% de la voirie est réservé aux pistes cyclables à Montréal et que l’utilisation du vélo y est malgré tout en forte augmentation. Mais bon que sont les faits devant des impressions et du ressenti?
Mon opinion est plus forte que ton élection
Pour les véloanxieux, les décisions des autorités compétentes dûment élues avec un programme et des intentions claires sont illégitimes, car elles ne vont pas dans le sens de leur opinion.
Un de leurs arguments préférés consiste à dire qu’on ne retrouve pas beaucoup de vélos sur les pistes cyclables et qu’il faudrait donc s’en débarrasser. Il faudrait ainsi que les pistes cyclables soient congestionnées pour qu’elles soient viables. Ceci révèle une profonde frustration de voir un espace de voirie qui n’est pas surchargé de véhicules comme la plupart de nos routes. Ils décrètent donc qu’il n’est pas normal de constater qu’un espace de voirie ne soit pas congestionné. Dans cette logique sans faille il faudrait donc se débarrasser de l’ensemble des rues résidentielles de ville et de banlieue ou encore de la majorité des rangs de campagne sur lesquelles ne roulent que quelques voitures de temps en temps.
Ultimement, le vélo et le maigre espace urbain qui lui est dédié semblent être aussi devenus pour beaucoup de ces commentateurs le symbole de leur propre immobilité. Et quand on n'avance pas, c’est plutôt tentant de vouloir faire reculer tout le monde.
Mon espace public, mon choix
Finalement, le choix du mode de transport pour circuler en ville devrait revenir à chacun, mais pour que ce soit vraiment un choix il faut y avoir accès. Des routes pour se déplacer en véhicule - que ce soit une voiture privée ou un autobus-, des pistes cyclables pour se rendre du point A au point B en vélo, des trottoirs pour se mouvoir à pied. Malheureusement, les véloanxieux semblent vouloir empêcher les gens d’avoir des choix.
Il est important de rappeler que ce ne sont pas les pistes cyclables qui créent les bouchons de circulation sur les autoroutes 10, 15 ou 40, c’est simplement le nombre de véhicules dans un espace donné à un moment précis. Et c’est exactement la même chose dans nos villes. Moins il y aura d'alternatives aux déplacements en auto, plus il y aura de congestion.
Longue vie aux pistes cyclables!
Cette lettre a initialement été publiée dans le Journal de Montréal le 27 mai 2025.